FIÈVRE APHTEUSE

FIÈVRE APHTEUSE
FIÈVRE APHTEUSE

La fièvre aphteuse tire son nom du mot grec aphthê (aphte) qui signifie brûlure et rappelle ainsi la vésicule caractéristique de la maladie. Elle est contagieuse, inoculable, due à un virus spécifique. Elle affecte les animaux sauvages (alpaga, antilope, buffle...) et domestiques à onglons fendus, c’est-à-dire les ongulés artiodactyles à doigts pairs (bovins, porcins, ovins, caprins); sa transmission à l’homme est tout à fait exceptionnelle.

Cette maladie est présente pratiquement sur tous les continents; parmi les grandes régions d’élevage, sont indemnes l’Amérique du Nord et centrale, les Antilles, le Chili, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Scandinavie, l’Irlande, la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et le Japon.

Elle est le type même des grandes épidémies: elle se propage sous forme épizootique et enzootique. L’importance de cette virose, le plus grand fléau de l’élevage, est essentiellement économique. En effet, si elle ne provoque que rarement la mort de l’animal, la perte de production qu’elle entraîne est considérable. Ses séquelles sont souvent graves et irréversibles; elle se prolonge fréquemment comme la plupart des maladies virales par des complications bactériennes. Ses conséquences économiques ont conduit à envisager la lutte contre la fièvre aphteuse sur le plan mondial. La F.A.O. (Organisation pour l’agriculture et l’alimentation) a créé, en 1958, à l’Institut de recherche des maladies à virus des animaux de Pirbright (Grande-Bretagne), un laboratoire mondial de référence sur la fièvre aphteuse, reconnu officiellement, en 1960, par l’Office international des épizooties (Paris). Ces organismes sont chargés de coordonner les travaux et les mesures susceptibles d’aboutir à l’éradication de la maladie.

Historique

La fièvre aphteuse était déjà connue des Grecs, mais la première épizootie décrite le fut en 1514 en Italie. En 1897, Löffler et Frosch démontrent la filtrabilité de l’agent pathogène et dégagent la notion de virus; ils établissent dès lors l’efficacité de la séroprévention. L’étude expérimentale se poursuit grâce à l’utilisation en 1920 par Waldmann et Pape de la sensibilité du cobaye à cette maladie. Cependant, dès 1922, un grand progrès est fait lorsque Vallée et Carré prouvent qu’il y a plusieurs types antigéniques de ce virus, expliquant ainsi la possibilité d’infections successives chez un même animal. Une étape décisive est franchie par Waldmann et Köbe (1938) qui obtiennent un vaccin formolé, adsorbé et chauffé. En 1955, Sellers produit du virus en culture de cellules in vitro .

De 1958 à 1969, des études immunologiques, des études sur la structure chimique du virus, sur ses propriétés physico-chimiques et biologiques se développent. En outre, la lutte anti-aphteuse s’organise sur le plan mondial: Office international des épizooties, Organisation pour l’agriculture et l’alimentation (F.A.O.), Organisation européenne de coopération et de développement économiques (O.C.D.E.), Bureau interafricain des épizooties, Centre panaméricain de la fièvre aphteuse et enfin la Commission permanente de la fièvre aphteuse.

Caractères et transmission de la maladie

Symptômes cliniques : deux catégories de mots servent à désigner cette maladie. Un premier groupe d’origine latine: fièvre aphteuse (français), fiebre aftosa (espagnol), afta epizootica (italien) rappelle la vésicule spécifique; un autre groupe, d’origine anglo-saxonne, évoque les lieux d’apparition de ces aphtes: foot and mouth disease (anglais), Maul-und Klauenseuche (allemand).

En effet, la maladie se caractérise par une fièvre suivie de l’apparition de vésicules sur les membranes muqueuses de la bouche, sur le museau, sur la peau autour et entre les onglons des pieds. Chez les bovins, les aphtes se trouvent surtout sur la langue et les pieds. Dans le cas des vaches laitières, on les rencontre aussi sur les mamelles et les pis; des lésions macroscopiques apparaissent sur la panse et le cœur. Chez le porc, les vésicules affectent le groin et les pieds, tandis que, chez le mouton et la chèvre, seules les lésions des onglons sont symptomatiques. Cette maladie est relativement bénigne (5 p. 100 de mortalité), excepté chez les jeunes où elle est généralement mortelle et chez les femelles gestantes dont elle provoque l’avortement.

Transmission : la fièvre aphteuse est une maladie extrêmement contagieuse; elle se propage sous forme épizootique et enzootique. Le seul vecteur direct connu est l’animal infecté lui-même, surtout pendant la phase fébrile où le virus se rencontre dans le sang, les organes, les sécrétions, les excrétions. Le virus libéré, cependant, peut subsister assez longtemps dans le sang séché, sur le sol, le bois, les vêtements, etc.

Durant la conservation normale à 4 0C des carcasses des animaux destinés à la boucherie, le pH du tissu musculaire descend à 5,5, entraînant la destruction rapide du virus. Il demeure infectieux pendant de nombreux mois dans la moelle et les ganglions.

Les animaux guéris peuvent rester porteurs de virus dans leur pharynx.

Virus de la fièvre aphteuse et prophylaxie

L’agent causal de la maladie est un virus à acide ribonucléique (ARN), à symétrie cubique. Sans enveloppe lipidique, sa capside est constituée de trente-deux capsomères de nature protéique. L’ARN représente 32 p. 100 et la partie protéique 68 p. 100 de la masse virale.

Le genre Picornavirus appartient à la famille des Napoviridae, ordre des Gymnovirales, classe des Ribocubicae, subphyllum des Ribovira.

Le virus de la fièvre aphteuse est sensible à différents agents physiques tels que la température (55 0C); il se dénature à des pH inférieurs à 6 et supérieurs à 11; les radiations ultraviolettes lui font perdre rapidement son infectiosité.

Les techniques de purification (précipitation, ultracentrifugation), associées aux méthodes biochimiques, biophysiques et à la microscopie électronique, ont permis de déterminer son diamètre (25 nanomètres), sa masse moléculaire (6,9 millions), son coefficient de sédimentation (140 svedbergs) et sa densité (1,43). Il est toujours accompagné d’un produit de dégradation non infectieux de 7 nanomètres.

La multiplication du virus a pu être obtenue au laboratoire, d’une part chez le cobaye, le hamster, le lapin, la souris..., et d’autre part en cultures de cellules (reins de porc et de hamster) sur lesquelles il exerce un effet cytopathogène qui apparaît sous forme de «plages». Ce phénomène permet un titrage aisé et une étude facile du cycle de réplication (6 heures à température optimale).

Asso a pu relier le pouvoir pathogène pour l’animal à deux facteurs génétiques d’identification, l’un relié à la diffusion du virus dans l’organisme, et l’autre contrôlant l’influence de la température sur le rendement de la production en virions.

Par sélection ou mutagenèse chimique, on peut obtenir des mutants dont la stabilité et la réplication chez l’animal sont suffisamment réduites pour que la maladie n’apparaisse pas, mais qu’une immunisation identique à celle obtenue à la suite de l’infection naturelle s’installe.

Différentes techniques sérologiques fondées sur la fixation du complément et la neutralisation du virus par les anticorps spécifiques, ainsi que les expériences d’immunodiffusion en gélose ont permis la mise en évidence de sept types immunologiques [cf. IMMUNOLOGIE]: O, A, C (les plus répandus), SAT1, SA2, SA3 (territoires d’Afrique), et ASIA1 (rencontré en Asie). Le laboratoire mondial de référence a pu en outre définir 53 sous-types: 23 A, 10 O, 4 C, 7 SA1, 3 SA2, 4 SA3 et 2 ASIA1.

En cas d’épizootie, l’abattage n’est envisagé que dans la mesure où un programme de vaccination conjoint est prévu. Dans les pays où la maladie sévit de façon enzootique, on procède à des vaccinations systématiques. Dans les régions indemnes, l’importation des animaux des espèces sensibles est interdite (inspection dans les ports).

Vaccins inactivés : étant donné le nombre de types et de sous-types de virus, la vaccination n’est efficace que si l’on envisage tous les sérotypes de virus aphteux présents dans le pays. Le virus est produit selon la technique de Frenkel sur des fragments en survie d’épithélium de langue de bœuf. Le virus, filtré, est adsorbé à pH 7,7 sur hydroxyde d’aluminium, puis dénaturé par le formol à 0,1 p. 100, et un chauffage à 26 0C pendant au moins 24 heures. Ce vaccin est stable à 4 0C pendant un an ou deux; les injections sont souvent répétées (tous les 4 mois en Amérique du Sud). Cette formule a permis d’obtenir un net recul de la maladie.

Vaccins vivants atténués : fondés sur l’immunisation active de l’animal, ils confèrent une protection durable; plusieurs sont en vente.

Importance économique

La fièvre aphteuse, maladie apparemment bénigne, a des conséquences économiques considérables. Les pertes sont très importantes en jeunes (avortement, mortalité), en viande (les animaux ne se nourrissent plus), en lait, entraînant une désorganisation du commerce des viandes. Un exemple frappant est celui de la Grande-Bretagne: au cours de la grande épizootie de 1967-1968, il a fallu abattre 211 825 bovins, 113 766 porcins, 108 345 ovins, 51 caprins; au Paraguay, il y eut plusieurs épidémies à la suite: 1972, 1975-1976 et 1979. Grâce à des mesures de prophylaxie associant une vaccination annuelle systématique des bovins et l’élimination de tous les animaux des espèces sensibles dans les foyers de la maladie, aucun foyer de fièvre aphteuse n’a été constaté dans la C.E.E. depuis la fin des années 1980.

Fièvre aphteuse maladie virale, d'une contagion à la fois très rapide et très subtile, atteignant toutes les espèces animales à onglons et se caractérisant cliniquement par l'apparition d'aphtes dans la bouche, dans les espaces interdigitaux et sur la mamelle. (Ces localisations sont à l'origine de son appellation en anglais [foot and mouth disease] et la démarche particulière des animaux atteints, sur la pointe des onglons à cause de la douleur, du terme de « cocotte » par analogie avec celle de dames perchées sur des talons hauts.)

Encyclopédie Universelle. 2012.

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